Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année XI — Mars 1868.

(Langue portugaise)

ESSAI THÉORIQUE DES GUÉRISONS INSTANTANÉES.

1. — De tous les phénomènes spirites, un des plus extraordinaires est sans contredit celui des guérisons instantanées. On comprend les guérisons produites par l’action soutenue d’un bon fluide ; mais on se demande comment ce fluide peut opérer une transformation subite dans l’organisme, et surtout pourquoi l’individu qui possède cette faculté n’a pas accès sur tous ceux qui sont atteints de la même maladie, en admettant qu’il y ait des spécialités. La sympathie des fluides est une raison, sans doute, mais qui ne satisfait pas complètement, parce qu’elle n’a rien de positif ni de scientifique. Cependant les guérisons instantanées sont un fait qu’on ne saurait révoquer en doute. Si l’on n’avait à l’appui que les exemples des temps reculés, on pourrait, avec quelque apparence de fondement, les considérer comme légendaires, ou tout au moins comme amplifiées par la crédulité ; mais quand les mêmes phénomènes se reproduisent sous nos yeux, dans le siècle le plus sceptique à l’endroit des choses surnaturelles, la négation n’est plus possible, et l’on est bien forcé d’y voir, non un effet miraculeux, mais un phénomène qui doit avoir sa cause dans des lois de la nature encore inconnues.

L’explication suivante, déduite des indications fournies par un médium en état de somnambulisme spontané, est basée sur des considérations physiologiques qui nous paraissent jeter un jour nouveau sur la question.

Elle a été donnée à l’occasion d’une personne atteinte de très graves infirmités, et qui demandait si un traitement fluidique pourrait lui être salutaire.

Quelque rationnelle que nous semble cette explication, nous ne la donnons point comme absolue, mais à titre d’hypothèse et comme sujet d’étude, jusqu’à ce qu’elle ait reçu la double sanction de la logique et de l’opinion générale des Esprits, seul contrôle valable des doctrines spirites, et qui puisse en assurer la perpétuité.

Dans la médication thérapeutique il faut des remèdes appropriés au mal. Le même remède ne pouvant avoir des vertus contraires : être à la fois stimulant et calmant, échauffant et rafraîchissant, ne peut convenir à tous les cas ; c’est pour cela qu’il n’y a pas de remède universel.

Il en est de même du fluide guérisseur, véritable agent thérapeutique, dont les qualités varient selon le tempérament physique et moral des individus qui le transmettent. Il y a des fluides qui surexcitent et d’autres qui calment, des fluides durs et d’autres doux, et de bien d’autres nuances. Selon ses qualités, le même fluide, comme le même remède, pourra être salutaire dans certains cas, inefficace et même nuisible dans d’autres ; d’où il suit que la guérison dépend, en principe, de l’appropriation des qualités du fluide à la nature et à la cause du mal.

Voilà ce que beaucoup de personnes ne comprennent pas, et pourquoi elles s’étonnent qu’un guérisseur ne guérisse pas tous les maux. Quant aux circonstances qui influent sur les qualités intrinsèques des fluides, elles ont été suffisamment développées dans le chapitre XIV de la Genèse pour qu’il soit superflu de les rappeler ici.


2. — A cette cause toute physique des non-guérisons, il faut en ajouter une toute morale que le Spiritisme nous fait connaître ; c’est que la plupart des maladies, comme toutes les misères humaines, sont des expiations du présent ou du passé, ou des épreuves pour l’avenir ; ce sont des dettes contractées dont on doit subir les conséquences jusqu’à ce qu’on les ait acquittées. Celui-là donc ne peut être guéri qui doit subir son épreuve jusqu’au bout. Ce principe est un motif de résignation pour le malade, mais ne doit pas être une excuse pour le médecin qui chercherait, dans la nécessité de l’épreuve, un moyen commode de mettre son ignorance à l’abri.


3. — Les maladies, considérées au seul point de vue physiologique, ont deux causes que l’on n’a point distinguées jusqu’à ce jour, et que l’on ne pouvait apprécier avant les nouvelles connaissances apportées par le Spiritisme ; c’est de la différence de ces deux causes que ressort la possibilité des guérisons instantanées dans des cas spéciaux et non dans tous.

Certaines maladies ont leur cause originelle dans l’altération même des tissus organiques ; c’est la seule que la science ait admise jusqu’à ce jour ; et comme elle ne connaît pour y remédier que les substances médicamenteuses tangibles, elle ne comprend pas l’action d’un fluide impalpable ayant pour propulseur la volonté. Cependant les guérisseurs magnétiques sont là pour prouver que ce n’est pas une illusion.

Dans la guérison des maladies de cette nature par l’influx fluidique, il y a remplacement des molécules organiques morbides par des molécules saines ; c’est l’histoire d’une vieille maison dont on remplace les pierres vermoulues par de bonnes pierres ; on a toujours la même maison, mais restaurée et consolidée. La tour Saint-Jacques  †  et Notre-Dame de Paris  †  viennent de subir un traitement de ce genre.

La substance fluidique produit un effet analogue à celui de la substance médicamenteuse, avec cette différence que sa pénétration étant plus grande, en raison de la ténuité de ses principes constituants, elle agit plus directement sur les molécules premières de l’organisme que ne peuvent le faire les molécules plus grossières des substances matérielles. En second lieu, son efficacité est plus générale, sans être universelle, parce que ses qualités sont modifiables par la pensée, tandis que celles de la matière sont fixes et invariables, et ne peuvent s’appliquer qu’à des cas déterminés.

Tel est, en thèse générale, le principe sur lequel reposent les traitements magnétiques. Ajoutons sommairement et pour mémoire, ne pouvant ici approfondir le sujet, que l’action des remèdes homœopathiques à doses infinitésimales est fondée sur le même principe ; la substance médicamenteuse étant portée, par la division, à l’état atomique, acquiert jusqu’à un certain point les propriétés des fluides, moins, toutefois, le principe animique qui existe dans les fluides animalisés et leur donne des qualités spéciales.

En résumé, il s’agit de réparer un désordre organique par l’introduction, dans l’économie, de matériaux sains substitués à des matériaux détériorés. Ces matériaux sains peuvent être fournis par les médicaments ordinaires en nature ; par ces mêmes médicaments à l’état de division homœopathique ; enfin par le fluide magnétique, qui n’est autre que la matière spiritualisée. Ce sont trois modes de réparation, ou mieux, d’introduction et d’assimilation des éléments réparateurs ; tous les trois sont également dans la nature, et ont leur utilité selon les cas spéciaux, ce qui explique pourquoi l’un réussit où un autre échoue, car il y aurait de la partialité à nier les services rendus par la médecine ordinaire. Ce sont, selon nous, trois branches de l’art de guérir destinées à se suppléer et à se compléter selon les circonstances, mais dont aucune n’est fondée à se croire la panacée universelle du genre humain.

Chacun de ces moyens pourra donc être efficace s’il est employé à propos et approprié à la spécialité du mal ; mais, quel qu’il soit, on comprend que la substitution moléculaire, nécessaire au rétablissement de l’équilibre, ne peut s’opérer que graduellement, et non comme par enchantement et par un coup de baguette ; la guérison, si elle est possible, ne peut être que le résultat d’une action soutenue et persévérante, plus ou moins longue selon la gravité des cas.

Cependant les guérisons instantanées sont un fait, et comme elles ne peuvent pas plus être miraculeuses que les autres, il faut qu’elles s’accomplissent dans des circonstances spéciales ; ce qui le prouve, c’est qu’elles n’ont pas lieu indistinctement pour toutes les maladies, ni sur tous les individus. C’est donc un phénomène naturel dont il faut chercher la loi ; or, voici l’explication qui en est donnée ; pour la comprendre, il fallait avoir le point de comparaison que nous venons d’établir.

Certaines affections, même très graves et passées à l’état chronique, n’ont point pour cause première l’altération des molécules organiques, mais la présence d’un mauvais fluide qui les désagrège, pour ainsi dire, et en trouble l’économie.

Il en est ici comme d’une montre dont toutes les pièces sont en bon état, mais dont le mouvement est arrêté ou déréglé par la poussière ; aucune pièce n’est à remplacer, et pourtant elle ne fonctionne pas ; pour rétablir la régularité du mouvement, il suffit de purger la montre, de l’obstacle qui l’empêchait de fonctionner.

Tel est le cas d’un grand nombre de maladies dont l’origine est due aux fluides pernicieux dont l’organisme est pénétré. Pour obtenir la guérison, ce ne sont pas des molécules détériorées qu’il faut remplacer, mais un corps étranger qu’il faut expulser ; la cause du mal disparue, l’équilibre se rétablit et les fonctions reprennent leur cours.

On conçoit qu’en pareil cas les médicaments thérapeutiques, destinés par leur nature à agir sur la matière, soient sans efficacité sur un agent fluidique ; aussi la médecine ordinaire est-elle impuissante dans toutes les maladies causées par les fluides viciés, et elles sont nombreuses. A la matière on peut opposer la matière, mais à un fluide mauvais il faut opposer un fluide meilleur et plus puissant. La médecine thérapeutique échoue naturellement contre les agents fluidiques ; par la même raison la médecine fluidique échoue là où il faudrait opposer la matière à la matière ; la médecine homœopathique nous semble être l’intermédiaire, le trait d’union entre ces deux extrêmes, et doit particulièrement réussir dans les affections qu’on pourrait appeler mixtes.

Quelle que soit la prétention de chacun de ces systèmes à la suprématie, ce qu’il y a de positif, c’est que, chacun de son côté obtient d’incontestables succès, mais que, jusqu’à présent, aucun n’a justifié celle d’être en possession exclusive de la vérité ; d’où il faut conclure que tous ont leur utilité, et que l’essentiel est de les appliquer à propos.


4. — Nous n’avons point à nous occuper ici des cas où le traitement fluidique est applicable, mais de la cause pour laquelle ce traitement peut, parfois, être instantané, tandis qu’en d’autres cas il exige une action soutenue.

Cette différence tient à la nature même et à la cause première du mal.

Deux affections qui présentent en apparence des symptômes identiques, peuvent avoir des causes différentes ; l’une peut être déterminée par l’altération des molécules organiques, et dans ce cas il faut réparer, remplacer, comme on me l’a dit, les molécules détériorées par des molécules saines, opération qui ne peut se faire que graduellement ; l’autre, par l’infiltration, dans les organes sains, d’un fluide mauvais qui en trouble les fonctions. Dans ce cas, il ne s’agit pas de réparer, mais d’expulser. Ces deux cas requièrent, dans le fluide guérisseur, des qualités différentes ; dans le premier, il faut un fluide plus doux que violent, riche surtout en principes réparateurs ; dans le second un fluide énergique, plus propre à l’expulsion qu’à la réparation ; selon la qualité de ce fluide, l’expulsion peut être rapide et comme par l’effet d’une décharge électrique. Le malade, subitement délivré de la cause étrangère qui le faisait souffrir, se sent immédiatement soulagé, comme il arrive dans l’extirpation d’une dent gâtée. L’organe, n’étant plus oblitéré, revient à son état normal et reprend ses fonctions.

Ainsi peuvent s’expliquer les guérisons instantanées, qui ne sont, en réalité, qu’une variété de l’action magnétique. Elles reposent, comme on le voit, sur un principe essentiellement physiologique et n’ont rien de plus miraculeux que les autres phénomènes spirites. On comprend, dès lors, pourquoi ces sortes de guérisons ne sont pas applicables à toutes les maladies. Leur obtention tient à la fois à la cause première du mal, qui n’est pas la même chez tous les individus, et aux qualités spéciales du fluide qu’on y oppose. Il en résulte que telle personne qui produit des effets rapides n’est pas toujours propre à un traitement magnétique régulier, et que d’excellents magnétiseurs sont impropres aux guérisons instantanées.

Cette théorie peut se résumer ainsi : « Lorsque le mal exige la réparation d’organes altérés, la guérison est nécessairement lente, et requiert une action soutenue et un fluide d’une qualité spéciale ; lorsqu’il s’agit de l’expulsion d’un mauvais fluide, elle peut être rapide et même instantanée. »

Pour simplifier la question, nous n’avons considéré que les deux points extrêmes ; mais entre les deux il y a des nuances infinies ; c’est-à-dire une multitude de cas où les deux causes existent simultanément à différents degrés, et avec plus ou moins de prépondérance de chacune ; où, par conséquent, il faut à la fois expulser et réparer. Selon celle des deux causes qui prédomine, la guérison est plus ou moins lente ; si c’est celle du mauvais fluide, après l’expulsion il faut la réparation ; si c’est le désordre organique, après la réparation il faut l’expulsion. La guérison n’est complète qu’après la destruction des deux causes. C’est le cas le plus ordinaire ; voilà pourquoi les traitements thérapeutiques ont souvent besoin d’être complétés par un traitement fluidique et réciproquement ; c’est aussi pourquoi les guérisons instantanées, qui ont lieu dans les cas où la prédominance fluidique est pour ainsi dire exclusive, ne pourront jamais devenir un moyen curatif universel ; elles ne sont, par conséquent, appelées à supplanter ni la médecine, ni l’homœopathie, ni le magnétisme ordinaire.

La guérison instantanée radicale et définitive peut être considérée comme un cas exceptionnel, attendu qu’il est rare : 1º que l’expulsion du mauvais fluide soit complète du premier coup ; 2º que la cause fluidique ne soit pas accompagnée de quelque altération organique, ce qui oblige, dans l’un et l’autre cas, d’y revenir à plusieurs fois.

Enfin les mauvais fluides ne pouvant venir que de mauvais Esprits, leur introduction dans l’économie se lie souvent à l’obsession. Il en résulte que, pour obtenir la guérison, il faut traiter à la fois le malade et l’Esprit obsesseur.


5. — Ces considérations montrent de combien de choses il faut tenir compte dans le traitement des maladies, et combien il reste encore à apprendre sous ce rapport. Elles viennent en outre confirmer un fait capital qui ressort de l’ouvrage sur la Genèse, c’est l’alliance du Spiritisme et de la science. Le Spiritisme marche sur le même terrain que la science jusqu’aux limites de la matière tangible ; mais tandis que la science s’arrête à ce point, le Spiritisme continue sa route, et poursuit ses investigations dans les phénomènes de la nature, à l’aide des éléments qu’il puise dans le monde extra-matériel ; là seulement est la solution des difficultés contre lesquelles se heurte la science.


Nota. La personne dont la demande a motivé cette explication est dans le cas des maladies à cause complexe. Son organisme est profondément altéré, en même temps qu’il est saturé des fluides les plus pernicieux qui la rendent incurable par la thérapeutique ordinaire seule. Une magnétisation violente et trop énergique ne produirait qu’une surexcitation momentanée bientôt suivie d’une prostration plus grande, en activant le travail de la décomposition. Il lui faudrait une magnétisation douce, longtemps soutenue, un fluide réparateur pénétrant, et non un fluide qui secoue mais ne répare rien. Elle est par conséquent inaccessible à la guérison instantanée.


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