Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année VI — Septembre 1863.

(Langue portugaise)

DISSERTATIONS SPIRITES.


LA CHASTETÉ.

(Groupe d’Orléans.  †  — Médium, M. de Monvel.)

De toutes les vertus dont le Christ nous a laissé l’adorable exemple, il n’en est pas une qui ait été plus indignement oubliée par la triste humanité que la chasteté. Et je ne parle pas seulement de la chasteté du corps, dont on trouverait encore sans doute sur la terre de nombreux exemples, mais de cette chasteté de l’âme qui n’a jamais conçu une pensée, laissé échapper une parole de nature à flétrir la pureté de la vierge ou de l’enfant qui l’écoute.

Le mal est si universel, les occasions de danger si multipliées, que les parents, même les plus véritablement chastes dans leurs actes comme dans leurs discours, ne peuvent échapper à la douloureuse certitude que leurs enfants ne pourront, quoi qu’ils fassent, se soustraire à la funeste contagion. Il leur faut, quelque répugnance qu’ils en éprouvent, se résigner à ouvrir eux-mêmes les yeux à ces innocentes créatures, pour les préserver tout au moins du danger physique, puisqu’il est absolument impossible de les préserver du danger moral ; et, bien souvent encore, lorsqu’ils croient avoir paré au danger, il se trouve quelque écueil dont ils n’avaient pas soupçonné l’existence, et sur lequel vient échouer le pauvre et innocent enfant que leur amour n’a pu préserver de la souillure du vice.

Combien de mots imprudents, même dans la société la plus choisie ; combien d’images et de descriptions, même dans les livres les plus sérieux, ne viennent-ils pas, à l’insu des parents, éveiller, exciter, ou même satisfaire complètement cette curiosité avide, si redoutable, de l’enfant qui n’a aucune conscience du danger ! Si le mal est difficile à éviter, même dans les classes les plus éclairées de la société, qu’est-ce donc dans les classes inférieures ? Et en supposant qu’un enfant ait eu le bonheur d’y échapper sous le toit paternel, comment le garantir de cet inévitable contact avec les vices qu’il coudoie chaque jour ?

Il y a là une plaie bien profonde, bien dangereuse, et dont tout homme qui a conservé au fond du cœur le sens moral doit éprouver le plus impérieux besoin de purger la société. Le mal est enraciné dans nos cœurs, et il s’écoulera bien du temps encore avant que chacun de nous soit devenu assez pur pour en soupçonner seulement la gravité. Tel croirait commettre une faute sérieuse s’il se permettait devant un enfant le moindre mot à double entente, qui, s’il se croit entouré de personnes d’un âge mûr, trouvera un plaisir avoué dans des plaisanteries obscènes ou triviales, qui, dit-il, ne font de mal à personne. Il ne voit pas que l’obscénité est un mal tellement immoral qu’il flétrit tout ce qu’il touche, même l’air, dont les vibrations vont porter au loin la contagion. On a dit que les murs ont des oreilles, et si cette figure a jamais été vraie, c’est surtout en pareille matière. La pure et sainte chasteté n’établira définitivement son règne sur la terre que lorsque toute créature qui pense et qui parle aura compris qu’elle ne doit jamais, en quelque circonstance que ce soit, ni écrire un mot ni prononcer une parole que la vierge la plus pure ne puisse entendre sans rougir.

Vous n’avez pas d’enfants, direz-vous, et il n’y en a pas un seul dans votre maison, et, dès lors, vous n’avez aucune raison, à ce qu’il vous semble, pour vous contraindre. Mais si vous étiez purs vous-mêmes, vous ne seriez pas obligés de vous contraindre ; et n’avez-vous pas des amis qui vous écoutent, que votre exemple excite, et qui peut-être ailleurs perdront devant des enfants, que vous ne connaissez pas, la réserve qu’un reste de pudeur leur avait fait observer jusque-là. Puis aussi, c’est presque toujours aux heures des repas que votre esprit se laisse aller à des saillies qui excitent le rire des convives ; mais ne voyez-vous pas ces serviteurs qui vous entourent, et votre voisin a des enfants ! Vous ne connaissez ni ce voisin ni ces enfants, et vous ne saurez jamais le mal dont vous avez été la cause ; mais le mal, de quelque part qu’il vienne, sera toujours puni, soyez-en convaincus. Il n’y a pas que les murs qui ont des oreilles, et il y a dans l’air que vous respirez des choses que vous ne connaissez pas encore, ou que vous ne voulez pas connaître.

Nul n’a le droit d’exiger de ses subalternes une vertu qu’il ne pratique ni ne possède lui-même.

Un seul mot impur suffit pour altérer la pureté d’un enfant ; un seul enfant impur introduit dans une maison d’éducation publique suffit pour gangrener toute une génération d’enfants, qui, plus tard, deviendront des hommes. Y a-t-il un seul homme sensé qui révoque en doute la vérité patente et douloureuse de ce fait ? Nul n’en doute, nul n’ignore toute l’étendue du mal qu’un seul mot peut faire, et cependant nul ne se croit obligé à cette chasteté de l’âme que révolte toute pensée obscène, quelque déguisée qu’elle soit, et même, dans de certaines circonstances, nul ne regarde comme une stricte obligation morale de s’abstenir de plaisanteries qui devraient le faire rougir lui-même, s’il ne se faisait gloire de ne plus rougir. Triste et honteuse gloire que celle-là !

Ce n’est pas seulement la chasteté que nous devrions respecter chez les enfants, c’est aussi cette délicate candeur à qui toute idée de fausseté fait monter le rouge au front ; et cette vertu est bien rare aussi ; mais quand on observe comment est élevée l’immense majorité de nos enfants, on ne doit pas s’en étonner beaucoup. Pour la plupart des parents les enfants, surtout en bas âge, ne sont guère que de petites poupées dont on s’amuse comme d’un charmant jouet. Et ce qui les rend si divertissants, c’est que leur naïve crédulité permet de les taquiner du matin au soir par ces petits mensonges qu’on croit innocents parce qu’ils sont faits sans méchanceté aucune, et uniquement, comme on dit, pour rire. Or, dans sa véritable acception, le mot innocent signifie : qui ne nuit pas ; mais qu’y a-t-il de plus nuisible, au contraire, à la candeur d’un enfant, que ces petits abus de confiance incessants dont il est dupe un instant, mais un instant seulement, dont il rit et s’amuse ensuite, et qu’il trouve le plus grand plaisir à imiter lui-même autant qu’il le peut.

Il résulte de cela que l’enfant souvent le plus candide apprend à tromper aussi vite qu’il apprend à parler, et qu’au bout de très peu de temps il est capable de donner des leçons à ses maîtres.

On ne se doute guère combien, surtout à cet âge, souvent une faible cause peut produire plus tard les plus déplorables résultats. Les organes de l’intelligence, chez les très jeunes enfants, sont comme une cire molle apte à recevoir l’empreinte du plus faible objet qui la touche ; et, ne fût-ce qu’un instant, il y a déformation ; et lorsque cette cire, si fluide d’abord, viendra à se figer, l’empreinte restera désormais ineffaçable. On peut croire qu’elle sera couverte par d’autres, c’est une erreur : l’empreinte primitive restera seule indélébile, et ce seront les impressions ultérieures, au contraire, qui ne laisseront qu’une trace fugitive et sous laquelle la première reparaîtra toujours.

Voilà ce que bien peu de jeunes pères sont capables de sentir avec assez de force pour s’en faire une règle de conduite avec leurs enfants, et ce qu’il faut leur répéter à satiété.

Célile Monvel.



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